Un soir au cinéma

Quand j'étais petit, je n'avais pas d'ordre. Plus tard non plus. Quand j'étais petit, je ne prenais pas soin de mes affaires. Plus tard non plus. Avant de partir pour l'école, dans la précipitation des bols renversés, je bourrais mon cartable des affaires censées me servir tout au long de la journée qui s'annonçait, mal la plupart du temps. Feuilles cornées, couvertures pliées, stylos répandant leur encre entre les pages qui gondolées finissaient par être collées les unes aux autres pour ressembler à un parchemin impénétrable. Tout ceci chiffonnait ma maman et exaspérait mes professeurs. Alors qu'hier soir, tirée à quatre épingles, j'aimerais parfois être piquant, dans le hall m'attendait Annie dont le bruit des talons transportait son impatience jusqu'à mes oreilles. J'étais en retard. Alors qu'il était trop tard, en vain j'avais cherché mes lunettes.

C'est ainsi qu'essoufflé, je me retrouvais salle 7 pour voir L'ordre des choses. Je ne me souviens plus si c'était ordre ou choses qui dictèrent mon choix. Pour faire court, c'est l'histoire d'un fonctionnaire italien scrupuleux qui est chargé, peu importe les moyens utilisés, de faire intercepter les embarcations de réfugiés tentant de se rendre en Italie par différents pouvoir libyens rivaux, réfugiés qui sont ensuite entassés dans des lieux de rétention. Je ne vais pas tourner autour du radeau, j'ai aimé. Le héros est un homme intègre et méticuleux pour qui chaque chose a sa place et doit être à sa place et inversement. Il a la possibilité mais en sortant du cadre légal d'aider une femme à rejoindre son mari en Finlande. Légalité ou humanité. Il devra choisir. La dernière scène est édifiante. Tout en décrivant une réalité pour le moins dramatique, ce film reste sobre. Il met en évidence les enjeux politiques, l'absence de solidarité, la violence, la pusillanimité, l'indifférence.