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Objectif négatif

26 janvier 2022

Nervures

Une feuille est tombée. Je l'ai vue quelques secondes avant qu'elle ne touche le sol. Elle a rejoint celles qui n'ont pas encore été dispersées. J'ai levé les yeux. Elle vient probablement du haut de l'arbre. Les branches du bas sont si dénudées. Je n'ai jamais vécu cet instant où une feuille se détache. Certaines, comme en fin de vie, déjà sèches, s'accrochent. Elles donnent l'impression de vouloir résister jusqu'à l'hiver. Pourtant, ici l'hiver n'est qu'une date sur les calendriers. Peut-être les rosées matinales sont-elles plus marquées. Se mêlant au ciel bleu, comme des cerfs-volants dans le vent, les feuilles du faîte virevoltent dans un bruissement. Les peupliers forment un bouquet démesuré. Ils s'épanouissent sous les caresses des jours. Ils semblent indifférents à la sécheresse. La terre grise pourtant enserre leur tronc dans une tentative permanente mais vaine d'étranglement. Je devine leurs racines. Elles s'entremêlent dans les profondeurs où se trouve l'humidité. Le matin, je les entends tous les six osciller dans un grincement que le vent de l'ouest emporte. Lorsque le soleil s'apprête à disparaître, leurs ombres les prolongent vers le cimetière. Elles donnent une teinte sombre au mur qui protège les tombes. Ce bruit cesse souvent quand la nuit tombe. Et comme ce soir, les arbres finissent par ne plus être que des ombres. Je sais qu'à l'aube ils s'offriront à nouveau à mon regard.
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20 janvier 2022

Une noisette pour un gland

Au tout début, il fixait le plafond. Ce n'est pas une question d'ennui. Juste l'habitude de regarder ailleurs pour ressentir plus intensément. Mais cette fois-ci ce n'est pas le cas. Il n'a simplement pas envie de voir ce qu'il voit. Il finit pourtant par baisser les yeux et regarder la femme. Ce n'est pas par curiosité. Il veut simplement voir comment elle procède pour pouvoir intervenir en cas de besoin. Quelques secondes plus tôt, comme à chaque fois ou presque, elle a plongé la main dans le tiroir de sa table de chevet pour saisir un tube. Comme à chaque fois, elle a pris la peine de lui préciser qu'il ne devait pas s'inquiéter, c'est  plus confortable pour toi et moi. C'est  une sorte de deux en un. Elle est charmante avec ses précautions oratoires. Elle l'a regardé en souriant. Aucun reflet de moquerie dans ses yeux. Il y a bien sûr déjà pensé. Pourtant, sans savoir pour quelle raison, jusque là il ne s'était pas senti concerné. La première fois, il fut surtout surpris. Tellement surpris qu'il ne chercha même pas d'excuse ni ne souhaita être rassuré. Il ne devait pas avoir envie. C'était tout. Il avait pourtant remarqué que la longueur de ce que l'on nomme les préliminaires n'était pas sans influence sur sa disponibilité. Il n'avait pas insisté et était parti, non sans laisser quelques billets sur l'oreiller. Seul depuis quelques années, il a rapidement renoncé à se lancer dans une relation suivie. Rien que d'y penser, cette perspective le fatigue. Il a pris l'habitude de chercher sur internet des rencontres tarifées ou non. A part ça, il entretient des relations avec d'anciennes collègues qui sont devenues des amies. Il déjeune régulièrement avec elles et se séparent après le café. Il apprécie les amitiés féminines qui n'engagent à rien si ce n'est à les prolonger. En cet fin d'après-midi, il doit se rendre à l'évidence. Cette fois-ci il est également à deux doigts de partir. Il veut éviter l'acharnement qui en soi est déjà une humiliation. Bien sûr, elle a l'habitude. Elle en a certainement vu d'autres, mais quand même.
Il s'éternise. On ne l'a pas vu passer. On a l'illusion de le prendre. On croit l'avoir. Le temps. Les effets du temps. Au saut du lit, expression qui jour après jour s'éloigne de la réalité,  quand je me regarde dans la glace, cette glace qui ne m'épargne rien, vierge de toute dissimulation, avant la douche qui adoucit quelque peu, qui lisse la réalité, je vois les effets du temps. Quand j'ai pris le temps de me regarder avec attention, il était déjà trop tard. Le mal était fait, irréversible. Sur mon visage, plus profondes que mes pensées, les rides. On pourrait croire que chaque jour creuse un peu plus chaque sillon d'où émergent des poil blancs qui, jour après jour, déciment leurs collègues noirs. Ah les poils! Toujours plus nombreux, toujours plus invasifs. Je n'ose pas toujours regarder le reste avec ses protubérances graisseuses, ma peau qui ici et là semble irrésistiblement attirée vers le sol et l'ensemble dont je constate le tassement un peu plus prononcé chaque matin. Je prends garde de ne jamais me regarder de profil. Par inadvertance je vois parfois mes fesses. Je n'ai même plus envie de les toucher. Il y a longtemps, si longtemps, j'y prenais plaisir. Je les savonnais sous la douche, je caressais leur galbe. Certains jours il m'arrivait même de m'exciter tout seul. Aujourd'hui elles ressemblent à deux mottes de beurre restées trop longtemps au soleil. Lâchement il m'arrive de me désolidariser de mon corps. Je suis capable de le renier trois fois de suite. Non, il n'a rien de sacré. Il ressemble de plus en plus à une relique. Quand je sors, je l'abandonnerais bien sur le canapé. Sortir seul sans lui. Dans les soirées, les dîners, faire comme si je ne le connaissais pas. Ou à défaut, préciser que c'est un corps d'emprunt, que le mien est en train de prendre une douche à la salle de sport où il se rend quatre fois par semaine. Oui je sais, avec l'âge il est normal d'avoir un corps qui se ramollit. Mais le mien n'est pas ramolli, il est flasque. J'y fais attention alors qu'il est trop tard. J'ai fouillé dans toutes les boîtes de photos pour me persuader qu'il n'a pas toujours été comme ça. J'ai trouvé des photos de lui en maillot de bain ou torse nu. J'ai pu ainsi constater qu'il fut un temps où mon corps était ferme et se tenait droit. Pourtant, j'ai beau creuser, je ne me souviens pas d'avoir été admiratif, ou heureux d'en posséder un comme ça. Je parie même que je ne le regardais même pas, inconscient que j'étais, inconscient du temps qui allait passer.
Mais une fois que je suis habillé avec des vêtements suffisamment larges pour dissimuler l'irréparable, je me sens mieux, même si mon visage laisse deviner qu'en dessous ce n'est guère reluisant. Le délabrement de l'extérieur est un moindre mal. L'attaque du temps a également lieu en profondeur, à l'abri des regards mais est non moins redoutable. On devrait pourtant s'y attendre. Le phénomène ressemble un peu à celui qui conduit à la création, à l'irruption d'un volcan. On sait que c'est dans les profondeurs que cela se passe, que se préparent les bouleversements. On a beau savoir, mais l'on trouve que  c'est sournois. Les essoufflements, les endormissements, les douleurs diverses et variées qui surgissent sans cause, la mémoire qui s’effiloche, les membres qui peinent à remplir leur office.
Allongé de tout son long sur le lit, il voit son corps de haut en bas. Cette vision le laisse tout chose. Ce n'est pas tout à fait une découverte. Pourtant à chaque fois, c'est l'incrédulité.  De deux doigts elle presse le tube. La crème se dépose sur le sommet de son index gauche. Allez, une noisette pour un gland lui lance-t-elle. Il lui sourit.
17 janvier 2022

A la page

Nous sautions d'une page à l'autre. Pas un mot plus bas que l'autre. Tu arrivais d'un jour à l'autre. Tu étais tout autre. Tes cuisses s'écartaient du droit chemin. Tu me mettais de côté. Non loin des circonstances atténuantes. Ma bouches par petites touches en noire et blanche. Le temps se prélassait entre les aiguilles. Comme une langue étrangère dont Je ne maîtrisais pas toujours la syntaxe. Tu te moquais dans un soliloque qui me laissait en loque. Pour toi, il n'était pas question qu'un jour il soit nine o'clock. Je voyais les voyelles entre tes lèvres. Les ronds dans l'autre. Parfois, les promesses s'écoulaient avant que ne cesse la nuit. Dans un souffle, je refaisais surface. Nous étions alors face à face. Je ne savais jamais si j'aimais ton sourire. Ta main me parcourait. D'un doigt tu appuyais ici ou là. Itinéraire par monts et par vaux. Humide il dévalait dans les ombres avant de sombrer, pour tourner et s'échouer sur une autre page.
20 octobre 2021

Pains

4 (2)

19 octobre 2021

Yport

L1150726

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18 octobre 2021

Chapeau de fleur

L1150831 (2)

15 octobre 2021

Chez Bouillon

2

4 juin 2021

C'est bien ça?

- Bonjour. Je vous en prie, asseyez-vous. Non, ici. Voilà, c'est mieux. Ça peut vous paraître pointilleux, mais c'est la procédure. N'y voyez rien de personnel. Si on ne respecte pas la procédure, c'est vite le bazar et on ne s'y retrouve pas. Je dis ça aussi pour vous. C'est dans votre intérêt. C'est comme dans la vie, il y a des règles et tout le monde est censé s'y conformer sinon ça tourne vite fait à la foire d'empoigne. Vous n'êtes pas d'accord?
Bon alors, entrons dans le vif du sujet. Si j'en crois ma collègue vous êtes ici pour déposer plainte. Si je vous demande de confirmer c'est qu'il arrive parfois que ce qui a été dit une première fois ne corresponde pas à ce qui est transmis dans un deuxième temps. De toute façon, c'est la procédure. Même si on peut trouver ça contraignant, personnellement je trouve que la procédure c'est rassurant et même par certains côtés, apaisant.
Bon, on est pas là pour parler des bienfaits de la procédure. C'est juste qu'il est important que toute personne qui pénètre dans nos locaux en soit informée. Personnellement, je trouve que c'est la moindre des choses. Ça évite les malentendus, les incompréhensions. C'est vrai, il faut que les choses soient bien claires dès le début. Prenez le code de la route. Et bien, si vous conduisez sans connaître par exemple la signification des panneaux, c'est l'accident assuré.
Bon allez, on s'y met, on n'a pas que ça à faire. Remarquez, vous pourriez me dire que nul n'est censé ignorer la loi. Et vous auriez raison. Mais bon, nous ici on est au service de nos concitoyens, alors le minimum que l'on puisse faire c'est de les informer. Et comme le dit notre chef, c'est un homme très humain, vous seriez surpris, ce qui va sans dire va mieux en le disant. Et puis on a parfois à faire avec des personnes de mauvaise foi. Donc, pour éviter les embrouilles comme disent les jeunes, nous préférons informer les justiciables. De toute façon, c'est la procédure.
Bon allez, entrons dans le vif du sujet. Remarquez, suivre la procédure, ça nous permet de nous concentrer sur l'essentiel. D'une certaine façon, on a l'esprit libéré. On n'a pas à se demander si on doit faire ceci où cela. Ça devient parfaitement naturel. Vous par exemple, si j'en crois mon collègue, vous êtes là pour porter plainte. Ça pourrait être autre chose, mais là, il se trouve que c'est pour une plainte. S'il n'y avait pas la procédure, on tergiverserait, on tournerait autour du pot. Résultat, vous ne seriez pas satisfaite et honnêtement pour tout vous dire moi non plus. On peut toujours se plaindre en disant que la procédure c'est lourd et je ne sais quoi encore. Peut-être, mais si on y réfléchit bien, c'est du gagnant-gagnant. Pour vous c'est rassurant et pour nous ça nous permet d'être complètement à votre écoute, d'être au plus près de vos préoccupations. Parce que si on réfléchit bien, ce qui est important, c'est l’empathie, la bienveillance. C'est ce qu'ils nous ont dit pendant le stage "De l'empathie  aux aveux."
Bon allez, venons en à vous. Non, parce que contrairement à ce qui se dit, nous suivons régulièrement des formations. Ce n'est pas uniquement du physique, du tir sur cible. Faut pas croire. Il y a des formation centrée sur le psychologique, l'accompagnement. Dans notre métier, il faut être sensible à l'autre, être capable d'analyser son langage corporel, déceler les non-dits, préserver sa sensibilité. Il faut que l'autre se sente écouté, compris, qu'il sente la bienveillance.
Bon allez, je parle, je parle. Vous allez finir par vous demander. Donc, si j'en crois mon collègue de l'accueil, ce sont souvent des stagiaires et pas forcément fute-fute, donc d'après lui vous êtes là pour porter plainte pour viol. C'est bien ça?   
5 mai 2021

Crissement

Je t'écris. Je t'écris un chuchotement. Je t'écris en vain. Dans l'ivresse du sang. Pour combler le vide. Je m'épanche. Les mots s'apaisent. Apparaissent au gré de l'effeuillage des pages. Détourne ta présence au travers dépassé. Un éternel instant d'oubli. Les restes d'un matin. Un brin de bleu. L'avant se découpe en fragments. J'ignorais que nous vivions l'avant. Serions-nous seuls à vivre l'après. Instant abrupte. Et la vie. Ah la vie. Mais quelle vie à la fin. La fin d'une vie. Quand chaque instant est une destination. Dans les allées crissantes. Pourquoi croirions-nous? L'absurdité déchire notre cœur. Perdu dans l'immensité d'un déchirement. Ton sourire nous apaise.
1 mai 2021

Trop c'est trop.

"Trop c'est trop" est une nouvelle plateforme d'information qui n'a pas pour vocation d'informer. Comme dirait mon ami Rocco c'est une sorte de fourre-tout qui héberge espagnoles comme tout autre étranger à lui-même. Voilà, bonne lecture.

Avec ou sans

Ce matin, alors que j'hésite à me lever sachant que personne ne m'attend, je me branche sur France Culture. Il est question de la pulsion. Bien que prenant la discussion en cours, j'identifie qu'il s'agit de pulsion sexuelle. Il me semble comprendre que la pulsion est essentiellement masculine. Et ensuite est abordé le sous-thème de l'alternative avec ou sans pénétration ? C'est à ce moment là qu'une intervenante déclare : « La pénétration a très souvent été remise en question dans la bouche des personnes que j'interrogeais ». Pour ce qui me concerne, le débat était clos et je retournais à mes petites affaires.

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