La vieille dame et le petit chien

Assise un peu de guingois, la vieille dame tapotait d'un doigt sur son portable et papotait avec son petit chien. De temps en temps, maintenant sa phalange sur l'écran, elle relevait la tête et regardait alentour sans me voir. Elle semblait attendre quelqu'un. Dans la profondeur de ses yeux verts se reflétait les rivages de sa vie. Son petit chien, aux yeux remarquablement globuleux, attendait également mais sur les genoux. Peut-être impatient d'aller trotter, il levait la tête vers sa maîtresse, son regard semblant lui dire "alors on y va?". Si c'était le cas, elle ne répondait pas. Elle continuait de poser le bout de son doigt ici et là sur l'écran, le gratifiant de caresses brèves et répétées. Comme une rupture entre l'attente et le virtuel, elle portait la tasse à ses lèvres entre lesquelles coulait le café. Son visage n'exprimait aucune satisfaction, aucun plaisir. Son portable vibra. Le petit chien aux yeux remarquablement globuleux se tint sur le qui-vive  Elle porta le téléphone à son oreille et écouta. Le temps s'écoula. Je me replongeai dans un article sur André Popp. Je l'entendis dire "Qu'est-ce que je peux faire? Je ne sais pas quoi faire." Puis, un silence qui se prolongea. Je relevai la tête. Elle avait disparu.